La plateforme de réservation en ligne Booking.com occupe une position dominante sur le marché de la réservation en ligne de chambres d’hôtels dans l’Union européenne.
En application de son nouveau Règlement sur les marchés numériques (Digital Markets Act ou « DMA »)[1], la Commission européenne a désigné Booking.com comme étant un « contrôleur d’accès » sur Internet.
Cette désignation a des implications majeures sur les pratiques commerciales de Booking.com et constitue une étape importante pour encadrer son comportement sur le marché. Elle bénéficie aux hôteliers, d’une part, en leur offrant une protection accrue contre les pratiques anticoncurrentielles de Booking.com et, d’autre part, en rendant particulièrement complexe toute éventuelle mesure de rétorsion qu’elle chercherait à prendre contre les hôteliers qui décideraient d’agir en indemnisation contre elle.
Qu’est-ce que le DMA ?
Le DMA est un règlement européen qui impose des obligations spécifiques aux grandes plateformes numériques, désignées par la Commission européenne en tant que « contrôleurs d’accès ». [2]
Ces contrôleurs d’accès contrôlent des services essentiels sur Internet tels que des moteurs de recherche, des réseaux sociaux ou des boutiques d’applications, et sont en mesure, en raison de leur position dominante, d’adopter des comportements anticoncurrentiels qui nuisent tant aux autres entreprises qu’aux consommateurs.
Le DMA vise précisément à prévenir ces comportements anticoncurrentiels.
À ce jour, la Commission européenne a désigné en tant que contrôleurs d’accès, en plus de Booking.com, Alphabet (société mère de Google), Apple et son iPadOS, ByteDance (propriétaire de TikTok), Meta (Facebook), Microsoft et Amazon.
Quelles obligations pour Booking.com au titre du DMA ?
En tant que « contrôleur d’accès », Booking.com se voit imposer plusieurs obligations en vertu du DMA.
En particulier, Booking.com a l’interdiction :
- d’imposer des clauses de parité tarifaire qui interdisent aux hôteliers de proposer leurs services à des prix plus bas sur d’autres plateformes ou sur leur propre site web ;[3] et
- de discriminer les hôtels qui choisissent de ne pas participer à ses programmes préférentiels, en réduisant leur visibilité sur la plateforme ou en limitant leur promotion.[4]
La Commission européenne est l’autorité chargée de s’assurer que Booking.com respecte les règles du DMA.
À cette fin, premièrement, la Commission européenne dispose de pouvoirs d’enquête, de coercition et de contrôle des contrôleurs d’accès.[5] Dans ce cadre, elle pourrait ainsi ouvrir une enquête sur Booking.com afin d’établir si cette dernière impose des clauses contraignant les hôtels à lui réserver un traitement favorable par rapport à ses concurrents.
Deuxièmement, en cas d’infraction, la Commission européenne dispose du pouvoir d’imposer des amendes pouvant atteindre jusqu’à 10 % du chiffre d’affaires mondial de Booking.com. Compte tenu de leur importance, ces amendes jouent un rôle avant tout dissuasif.[6]
Pourquoi le DMA profite-t-il aux hôteliers qui souhaitent agir en indemnisation ?
Comme mentionné ci-dessus, Booking.com fait désormais l’objet d’un contrôle spécifique de la part de la Commission européenne en raison de sa désignation en tant que « contrôleur d’accès » dans le cadre du DMA.
Toute mesure de rétorsion que Booking.com prendrait serait alors sans nul doute détectée par la Commission européenne, et pourrait donner lieu à des sanctions.
La désignation de Booking.com comme contrôleur d’accès contribue donc, en plus du fait que des milliers d’hôteliers ont décidé d’agir en même temps en indemnisation contre elle, à rendre plus qu’improbable toute éventuelle mesure de rétorsion que Booking.com aurait pu envisager de prendre à leur égard.
En conclusion, le DMA, tout comme les différentes décisions adoptées contre Booking.com par la Cour de justice de l’Union européenne et des autorités espagnole et italienne de concurrence, bénéficie sans aucun doute aux hôteliers français.
[1] Voir, en ce sens, le résumé de la décision de la Commission européenne du 13 mai 2024, disponible ici.
[1] Pour le texte intégral du DMA, voir ici.
[2] Pour le texte intégral du DMA, voir ici.
[3] Article 5(3) du DMA.
[4] Article 5(4) du DMA.
[5] Articles 20 et suivants du DMA.
[6] Article 30 du DMA.